Mycothérapie : quels bienfaits scientifiques du lion’s mane sur la concentration et la mémoire chez l’adulte ?

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Face à une surcharge cognitive permanente, préserver sa clarté mentale est devenu un enjeu majeur. Le stress, le vieillissement et un flux d’informations incessant menacent nos capacités de mémorisation et de concentration. La mycothérapie, science ancestrale des champignons, offre des réponses intéressantes. Parmi elles, le lion’s mane (Hericium erinaceus), ce champignon à l’allure unique, est réputé en Asie depuis des siècles. La science moderne valide aujourd’hui son potentiel neuroprotecteur, le positionnant comme un allié précieux pour nos fonctions cognitives.

Comment le lion’s mane agit-il sur notre cerveau ?

Au cœur des effets du lion’s mane se trouvent des composés bioactifs uniques. Deux familles se distinguent : les erinacines, localisées dans le mycélium (la partie racinaire), et les hericenones, présentes dans le sporophore (le corps visible). Leur particularité ? Une taille moléculaire suffisamment petite pour franchir la fameuse barrière hémato-encéphalique, cette forteresse qui protège notre cerveau. Une fois cette barrière passée, leur action est directe et ciblée.

Leur mission principale est de stimuler la synthèse endogène de deux protéines fondamentales. Le facteur de croissance nerveuse (NGF). Le facteur neurotrophique dérivé du cerveau (BDNF). Il faut voir ces protéines comme un véritable engrais pour nos neurones. Elles sont indispensables non seulement à la survie et à l’entretien des cellules nerveuses existantes, mais aussi, et c’est crucial, à leur croissance et à la création de nouvelles connexions synaptiques. C’est ce qu’on appelle la neuroplasticité. En activant ces voies métaboliques, le lion’s mane soutient la capacité fondamentale de notre cerveau à se réorganiser, à apprendre et à s’adapter tout au long de notre existence.

Un bouclier protecteur pour les neurones

Au-delà de son rôle de bâtisseur, le lion’s mane agit comme un gardien vigilant. Le cerveau, organe extrêmement énergivore, produit une grande quantité de déchets métaboliques et est particulièrement sensible au stress oxydatif. Pensez à une sorte de rouille cellulaire qui endommage progressivement les neurones. Le lion’s mane renferme de puissants antioxydants, comme l’ergothionéine, qui neutralisent ces radicaux libres délétères. Une protection essentielle.

Parallèlement, il déploie des propriétés anti-inflammatoires notables. Il aide à réguler la neuro-inflammation, un processus silencieux mais destructeur, aujourd’hui clairement impliqué dans la plupart des maladies neurodégénératives et dans le déclin cognitif lié à l’âge. En agissant comme un véritable bouclier, le champignon contribue à maintenir un environnement cérébral sain, un prérequis indispensable pour la neurogenèse (la naissance de nouveaux neurones) et la plasticité synaptique. C’est cette double action, à la fois stimulante et protectrice, qui explique son potentiel remarquable pour améliorer la concentration, la clarté mentale et les processus de mémorisation, notamment dans des zones cérébrales clés comme l’hippocampe, le siège de la mémoire.

Que dit la science sur son efficacité ?

Avant de tirer des conclusions pour l’homme, la recherche s’appuie sur des études précliniques rigoureuses. Dans le cas du lion’s mane, les résultats en laboratoire sont particulièrement convaincants. Quelle découverte remarquable ! Des études *in vitro*, menées sur des cultures de cellules nerveuses, ont démontré que certains de ses composés actifs, notamment l’erinacine A, induisent de manière significative la croissance des neurites. Ce sont ces prolongements qui permettent aux neurones de communiquer entre eux. Un processus fondamental.

Sur les modèles animaux, les observations sont tout aussi intéressantes. Des recherches menées sur des souris atteintes de troubles cognitifs ont montré que l’administration d’extraits de Hericium erinaceus pouvait non seulement réduire l’accumulation de plaques amyloïdes, ces agrégats protéiques toxiques associés à la maladie d’Alzheimer, mais aussi diminuer le stress oxydatif dans l’hippocampe. En conséquence, les animaux supplémentés ont affiché de bien meilleures performances dans des tests de mémoire spatiale et de reconnaissance, comme s’orienter plus rapidement dans un labyrinthe. Rarement un champignon n’a fourni une base biologique aussi solide pour son usage traditionnel.

Les essais sur l’humain : des bénéfices ciblés et prometteurs

Lorsque l’on passe aux essais cliniques sur l’être humain, le tableau se précise. Les données les plus solides proviennent d’études menées sur des populations d’adultes âgés présentant un déclin cognitif léger (MCI en anglais). Dans plusieurs essais randomisés contrôlés contre placebo, une supplémentation quotidienne (généralement entre 1 et 3 grammes d’extrait) sur une période de 12 à 49 semaines a entraîné une amélioration significative des scores aux tests cognitifs standards, comme l’échelle HDS-R ou le Mini Mental State Examination (MMSE). Les participants ont vu leur mémoire à court terme, leur orientation et leur attention s’améliorer de manière mesurable.

Mais alors, qu’en est-il des adultes jeunes et en bonne santé ? Ici, les résultats sont plus subtils. Contrairement à une idée reçue, le lion’s mane n’est pas un “nootropique” miracle qui décuple instantanément les capacités. Le potentiel d’amélioration étant plus faible chez un individu dont les fonctions sont déjà optimales, les effets du champignon sont plus discrets et plus difficiles à quantifier avec les outils actuels. Cette variabilité s’explique aussi par des différences importantes dans les protocoles de recherche, car le type d’extrait utilisé (mycélium riche en erinacines ou sporophore riche en hericenones), le dosage précis et la durée de l’étude influencent grandement les conclusions.

Optimiser les bienfaits du lion’s mane au quotidien

Face à une offre de compléments alimentaires en pleine expansion, savoir faire un choix éclairé devient crucial. La qualité et l’efficacité d’un produit à base de lion’s mane dépendent de plusieurs facteurs techniques. Comme nous l’avons vu, les erinacines se concentrent dans le mycélium tandis que les hericenones abondent dans le sporophore. Certains experts du domaine, s’appuyant sur une vision synergique, estiment qu’une approche “spectre complet” combinant les deux parties du champignon est idéale pour bénéficier de l’ensemble des composés actifs.

La méthode d’extraction est un autre point de vigilance. Une double extraction (d’abord à l’eau chaude, puis à l’alcool) est la méthode de référence. Pourquoi ? Parce que l’eau permet d’extraire les polysaccharides hydrosolubles, tandis que l’alcool est nécessaire pour isoler les triterpènes (comme les erinacines et hericenones) qui ne sont pas solubles dans l’eau. Il est donc essentiel de choisir des compléments qui précisent la partie du champignon, la méthode d’extraction et, idéalement, la concentration en composés actifs (par exemple, en bêta-glucanes). Concernant le dosage, les études cliniques suggèrent des doses allant de 1 à 3 grammes d’extrait par jour. Patience est mère de toutes les vertus : les mécanismes de neurogenèse étant lents, une supplémentation d’au moins 3 mois est souvent recommandée pour observer des bénéfices tangibles.

L’importance d’une approche holistique de la santé cognitive

Le lion’s mane est un outil formidable, mais il ne s’agit pas d’une solution magique. Son plein potentiel se révèle lorsqu’il est intégré dans une stratégie globale de santé cérébrale. Ses bienfaits seront décuplés en synergie avec une hygiène de vie qui nourrit activement le cerveau. Cela commence dans l’assiette. Une alimentation de type méditerranéen, riche en polyphénols (petits fruits rouges, légumes verts à feuilles), en bons gras comme les oméga-3 (petits poissons gras, huiles de lin et de colza) et en antioxydants, constitue la base.

L’activité physique régulière est un autre pilier non négociable. Bouger augmente naturellement la production de BDNF, créant une synergie parfaite avec l’action du lion’s mane. Enfin, une gestion proactive du stress (par la méditation, la cohérence cardiaque) et un sommeil profond et réparateur sont absolument fondamentaux. Ils protègent l’hippocampe des effets délétères du cortisol, l’hormone du stress. Dans ce contexte, la supplémentation en lion’s mane semble particulièrement pertinente pour les personnes cherchant à prévenir le déclin cognitif lié à l’âge ou celles qui ressentent une baisse de performance mentale, toujours en complément d’un suivi médical adapté.

Le lion’s mane s’impose comme un acteur majeur de la mycothérapie cognitive. Soutenu par des mécanismes d’action clairs et une recherche préclinique solide, son potentiel est remarquable, en particulier chez les adultes qui connaissent un début de déclin cognitif. Ses composés uniques stimulent la régénération neuronale tout en protégeant le cerveau du stress oxydatif et de l’inflammation. Bien que son efficacité chez les jeunes en pleine santé nécessite des études plus vastes, il représente déjà une approche naturelle et très prometteuse. Intégré à une stratégie globale de bien-être, il devient un levier puissant pour préserver notre capital cérébral sur le long terme.

 

Références

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